Journaliste de formation, touche-à-tout et furieux amoureux de la culture, Cyrille Falisse est aujourd’hui libraire à Papiers Collés à Draguignan, après un joli et original parcours professionnel.
Cyrille a démarré comme créateur de contenu multimédia dans une boîte de pub en Belgique avant de devenir réalisateur de documentaires et animateur de formation en journalisme en Tanzanie. A Paris, il a créé et dirigé le site collaboratif de cinéma Le Passeur Critique et l’a co-animé pendant dix ans.
Cyrille Falisse faisait également partie du comité de lecture de l’École des Loisirs. Il collabore aujourd’hui à la revue Page des libraires. Conscient de faire le plus beau métier du monde, il se voit comme un passeur et défend une littérature engagée, qui bouscule autant qu’elle libère.
SON LIVRE FONDATEUR
NARCISSE ET GOLDMUN / HERMANN HESSE
“Un livre fondateur dépend fortement de l’époque à laquelle on le découvre. Pour chaque période de la vie, il y a sans doute un texte qui accompagne, transforme ou encourage à vivre. Et de toutes les périodes, celle qui bouleverse sans doute le plus l’ordre des choses est l’adolescence. C’est adolescent que je découvre Hermann Hesse et son roman initiatique Demian. Mais c’est en lisant Narcisse et Goldmund que je chavire.
À cette époque, ma maman est en phase terminale d’un cancer. Dans le roman du prix Nobel de littérature, Narcisse et Goldmund sont deux orphelins de mère. L’un, Narcisse, éprouvera la vie par l’étude des textes, la science, la méditation religieuse, l’autre, Goldmund, quittera le monastère pour vagabonder, aimer et devenir un artiste. Les deux, amis aux philosophies opposées, chercheront toujours que ce soit dans la beauté du monde ou la contemplation, la figure maternelle. Devenu sculpteur, Goldmund n’aura de cesse de créer le visage de sa mère absente qu’il verra sourire et lui aspirer le cœur dans toutes les formes que prendra la nature.
Juste avant de mourir, ses derniers mots adressés à Narcisse seront les suivants : « Mais comment veux-tu mourir un jour, Narcisse, puisque tu n’as point de mère ? Sans mère on ne peut pas aimer, sans mère on ne peut pas mourir. » A l’enterrement de ma maman, je n’ai pas pu prendre la parole ou écrire quelque chose qui soit digne de notre vie ensemble, mais un de mes amis a lu un long extrait de Narcisse et Goldmund. Hermann Hesse m’a en quelque sorte offert ses mots, le jour où les miens disparaissaient.”